Néfertiti dans un champ de canne à sucre - Philippe Jaenada
Il s’appelle Titus mais sa mère l’a toujours appelé Miette.
Tout ça parce que Titus pesait moins de deux kilos et demi à la naissance, que sa mère voulait l’appeler Loïc, son père Franck et que le facteur avait dit que si un jour Bérénice - le hamster de la famille - avait un amoureux, il faudrait l’appeler Titus.
C’est au Saxo bar que Titus rencontre cette fille dont il va tomber éperdument amoureux.
Elle s’appelle Olive, elle lit (elle lit beaucoup), un peu amère un peu grave, coincée dans son anorak à dix francs, un peu lointaine sous son petit chapeau de maçon bleu. Elle porte la jupe la plus laide que Titus a jamais vu, des mi-bas marrons en nylon transparent et des bottines de cuir grenat probablement rachetées à prix modique à miss Roumanie 73.
Olive va aux toilettes sans arrêt, peut rester trois ou quatre jours sans se laver, bouffe comme douze et devient dingue dès qu’elle a faim et que plus rien ne compte sauf de manger. Comme rien ne l’arrête quand elle veut du sexe car Olive est aussi dotée d’un besoin considérable à ce niveau-là ; besoin dicté en partie par une forme de nécessité impérieuse de se sentir souillée dans les bras d’un autre, des autres…
Des personnages attachants, un texte exquis autant qu’il est loufoque pour ce trèèèèès beau roman de Philippe Jaenada.
« …Plus tard dans l'après-midi, elle a repris des forces et ça se voit. Elle nage comme une sauvage aquatique dans l'océan sous la pluie, vêtue du maillot de bain troué de son grand-père (celui qu'elle a tué – je raconterai ça plus tard). Un maillot de bain de tissu noir, trop grand pour elle et usé jusqu'à la décomposition, avec un petit sigle orange clair sur la poitrine. Moi je suis assis comme un lourdaud sur cette immense plage sake de Coney Island et je mange un hot dog dégueulasse (très orange) en regardant mes chaussures de caoutchouc rouges s'enfoncer lentement dans le sable humide."
Néfertiti dans un champ de canne à sucre